Now Reading
Street Knowledge – Créer des vocations

Street Knowledge – Créer des vocations

Snype, l’homme à tout faire de Street Knowledge explique pourquoi son émission est incontournable pour le HipHop en Belgique et ailleurs.

Snype/ Street Knowledge

Peux-tu nous présenter l’équipe de Street Knowledge ?

L’équipe en fait est très réduite. On travaille essentiellement à trois. Il y a les deux animateurs : Fourmi aka Phil One (le leader de Zulu Nation en Belgique) qui assure l’animation de toute l’émission et Defi J qui retrace l’historique du mouvement HipHop. Et moi, qui touche un peu à tout. Je suis cameraman, monteur, preneur de son, polyvalent. De toute façon, on fait un peu tout à l’arrache, avec les moyens du bord.

Phil One, ça va faire plus de 25 ans qu’il est dans le mouvement HipHop en Belgique. Pour ma part, ça va faire un peu plus d’une vingtaine d’années, nous sommes tous les trois, des pionniers ici en Belgique.

 

Street Knowledge, c’est quoi ? Qu’est-ce qu’on y trouve ?

C’est une émission constituée de différentes rubriques qui sont introduites par Phil One. Nous avons l’historique du mouvement HipHop, des minis reportages, des tutoriaux sur le DJing, la danse, mais aussi des reportages qui retracent l’historique du graffiti, de certains crews de graffiti, de danse, des rappeurs, d’autres personnes de l’ombre également, des beatmakers, des managers. La palette de reportages est assez large. Nous avons également notre partenaire «Live N Direct», pour tout ce qui concerne les news internationales, les interviews d’américains, de français également, enfin tout ce qui est international!

Chronix.be est également un partenaire et diffuse l’émission sur son site internet. Et bien sûr, il y a la Zulu Nation. Nous sommes tous Zulus!

 

En France, nous avons eu Sidney avec l’émission HipHop, Rapline avec Olivier Cachin, plus des relais radio un peu partout notamment Nova qui a marqué le coup. Aviez-vous à la même époque des médias qui suivaient l’évolution de la culture HipHop Belge? Estimez vous avoir été également héritiers  de tout ça?

Des choses dans lesquelles il y a eu des répercussions dans les medias ? Il n’y en a pas eu. On peut dire que l’émission HipHop a créé pas mal de vocations pour pas mal de monde ici, donc on a découvert ça aussi, car il n’y avait absolument rien du tout. Par contre, on n’avait pas forcement besoin des medias pour connaître le HipHop, nous avions des potes qui partaient aux USA et nous ramenaient des cassettes. On a connu Beat Street avant que ça passe a la télé et ainsi de suite. Nous avons fait notre éducation HipHop un peu tous seuls, sans l’aide des médias.

 

A  quand remonte la première émission de Street Knowledge?

La première émission Street Knowledge remonte à septembre 2008. C’est une jeune émission! Et comme tu vois c’est la première émission en Belgique depuis la naissance du mouvement. Ça fait plus de 25 ans qu’on attendait ça.

 

C’est la première émission dédiée a culture HipHop belge ? Pourquoi il a fallu autant de temps?

C’est une question de moyens. Il faut de l’argent, du temps, de la motivation et nous étions tous aussi dans une discipline différente du HipHop. Defi J était rappeur et DJ. Moi, dans un groupe un peu avant ça, j’étais danseur et DJ. Donc on a touché un peu à toutes ces disciplines là et on savait qu’il fallait une maturité, qu’il fallait le temps, un peu de bouteille pour faire une émission de ce type.

 

Sur le net, il existe différentes émissions HipHop, comment comptez-vous vous distinguer et communiquer par rapport à tout cela?

Je crois que l’on se distingue tout simplement en étant nous-mêmes, on ne veut pas ressembler à une émission qu’on trouve sur MTV ou MCM , ou une émission française ou allemande ou US.

On n’a pas essayé de copier Yo ! MTV rap, on a voulu avoir un truc qui nous ressemblait. Moi je  trouve que notre HipHop en Belgique est très REAL, très vrai, très authentique et donc on essaie de faire en sorte que cela se reflète dans l’émission. C’est pour ça qu’on a ce côté éducatif, ludique, clip vidéo, un peu de promo. C’est grâce à ça qu’on va se distinguer je crois.

 

Entre la France et la Belgique, les échanges culturels ne sont pas si visibles. Pourtant, c’est le même mouvement et la même langue. L’information a du mal à arriver à temps. Selon toi, quelles sont les choses à améliorer en priorité?

Il faut avoir les partenariats à mon avis. Il faut s’ouvrir, ouvrir les portes. À la base, c’est une culture qui prône l’ouverture. Quand tu regardes bien, il y a beaucoup de groupes qui se forment via l’amitié, donc il faut se bouger les fesses, il faut aller l’un vers l’autre. Et c’est d’ailleurs ce que l’on essaie de faire avec le Battle France-Belgique. On va essayer d’étendre ça à toute la francophonie.

C’est pour ça que j’ai vraiment eu envie d’avoir ce coté Live & Direct international. C’est vrai que pour l’instant on a touché beaucoup d’interviews US. Mais faire notamment du Médine ou n’importe quel artiste Français en interviews dans notre émission, c’est clair que c’est l’un des buts aussi. Alors après le net, c’est super vaste, les connexions y sont très faciles à faire. L’information peut passer très vite mais il suffit juste qu’on se mette en contact, je crois.

 

Comment évolue le HipHop dans sa globalité chez vous? Quels sont les points positifs et les points négatifs à l’heure actuelle?

Les points négatifs seraient dans l’évolution. On peut parler d’avant et de maintenant. Avant, on n’avait pas énormément de modèles donc nous avons créé nos propres façons de rapper, nos propres univers, notre culture en réalité. On a eu de l’influence française, d’office, mais à côté de ça on a essayé de créer nos styles. On n’a pas le même accent, c’est comme demander à un marseillais de rapper avec l’accent de Paris. C’est la même chose, donc on a notre style, notre culture. Et cette notion de culture HipHop était très importante pour nous.

Maintenant, nous sommes tout doucement en train de perdre ça. C’est sur ça que l’on bosse beaucoup avec Street Knowledge. On s’efforce d’unifier les disciplines, de montrer que c’est une vraie culture. On n’a pas envie que ça parte en « couille » comme en France où les rappeurs ne font pas du HipHop, ils font du rap. Le côté HipHop, ils s’en foutent un peu, les danseurs font leur trucs de leur côté mais ils ne viennent pas trop dans les Battles MC et ainsi de suite.

 

L’émission se présente donc sous la forme suivante : un  invité, des reportages, un historique, des chroniques d’évènements, des tutoriaux de danse et de DJing. Mais le tout est en français. Est-ce que le coté flamand n’est pas un peu délaissé pour le moment, et comment cela est perçu de leur côté?

C’est  marrant que tu me dises ça parce que c’est une question qui est à l’ordre du jour pour l’instant chez nous. On envisage de faire du sous-titrage en néerlandais, pour justement unifier les deux communautés. Pour l’instant, je recherche quelqu’un qui pourrait m’aider là dessus. On a déjà beaucoup de boulot, si en plus je devais faire du sous-titre sur des émissions de 45min… Disons que je cherche une personne motivée et qui ne va pas me laisser tomber après deux ou trois émissions, mais dès que je l’ai, ça va se faire!

 

Le coté tutorial que vous mettez en avant est quand même un retour aux fondamentaux. Est-ce dû aussi à une perte de la culture ? Parce qu’à la base on nous demande aussi d’être autodidacte.

Non , non ce serait plutôt pour aiguiller les jeunes qui se lancent dans ce mouvement là, dans ces disciplines, juste pour leur dire qu’il y a des gars qui sont là pour vous guider, pour vous entourer, pour vous donner des cours, et c’est le but de ces tutoriaux justement . Et puis ça nous permet aussi de mettre en avant tous ces artistes DJs, danseurs qu’on ne voit pas forcément alors que ça fait des années qu ‘ils donnent des cours et on ne le sait pas forcément. On les fait découvrir via l’émission. Je ne crois pas que ce soit pour combler un manque de culture mais c’est pour dire aux jeunes que là vous apprendrez quelque chose et il y a moyen de continuer en suivant ces gars là.

 

A quel rythme comptez vous fonctionner en vidéo vu que tout s’accélère aussi bien le temps que l’actualité. Comptez-vous vraiment donner des news aux internautes à votre rythme ou suivre cette accélération du temps comme la plupart des médias?

Pour l’instant on va essayer de garder le rythme qu’on a, soit une émission par mois. Parce  que c’est énormément de boulot. On préfère un travail de qualité avec le moins de défauts possibles, bien que des défauts il y en aura toujours. Parce qu’on est toujours en train d’apprendre au fur et à mesure. On essaie d’avoir un truc le mieux possible, par exemple deux émissions par mois, ce serait impossible ou alors il faudrait diminuer le temps, diminuer la qualité et ainsi de suite. C’est clair qu’Internet et la période actuelle nous poussent à ce qu’on fasse toujours plus et de plus en plus vite. Mais je crois qu’il y a d’autres sites pour relier l’information, il y a Chronix, il y a votre site, il y a un grand nombre de webzines, on a notre place mais on ne veut pas faire le boulot des autres non plus, chacun à sa place. On peut tous cohabiter et on peut tous faire notre taff et voila!!

 

Qu’est-ce que vous considérez dans le domaine du partage et qu’est-ce que vous placez au rang d’exclusivité pour les internautes étant donné que sur votre site il y a différents liens ?

En fait le grand nombre de liens que tu as, c’est dans les archives ou bien un peu dans l’historique. A la base l’histoire de Street Knowledge, ce n’est pas une émission. L’idée initiale, c’était de  retracer l’histoire du HipHop par les vidéos et centraliser toutes ces vidéos que l’on trouve sur youtube, dailymotion  sur un seul site. Au lieu de faire du time-line ou bien du texte un peu pompeux qu’on n’a pas envie  de lire, on s’est dit qu’on va faire de l’éducatif avec du ludique. A titre d’exemple, si tu cliques Cypress Hill, tu retrouves tous leurs clips puis ainsi de suite et tu retraces l’histoire du HipHop, du mouvement comme ça et d’ailleurs on doit le remettre à jour car ce ne sont pas forcement nos vidéos.

Sinon, tout ce qui est Street Knowledge l’émission, c’est exclusif. Il n’y a aucune image que tu retrouves quasi ailleurs et il y a des grosses exclusivités notamment  une émission qu’on a fait avec le Rock Steady Crew, ça ce sont des images aux States dans les back stages.100% exclusif.

 

Quels sont les retours en terme de fréquentations pour l’instant, Est-ce que c’est surtout en Belgique ou est-ce que Street Knowledge commence à faire parler dans le reste de l’Europe?

Ca commence à s’étendre en Europe. Les gens ne comprennent pas forcément, c’est pour ça pour l’autre question du néerlandais, il y a aussi la question de l‘anglais. On s’interroge là dessus, mettre les sous-titres en néerlandais ou en anglais, pour que cela soit vraiment universel et que partout dans le monde on puisse voir l’émission.

On a de très bons retours partout, même en France. Il y a même un gars qui nous disait sur un message que c’est dommage de ne pas avoir ça en France alors qu’il existe d’autres concepts d’émission. Moi ce que j’ai du retour du HipHop belge en général, c’est le côté REAL, le coté authentique. Ici en Belgique, on a eu cette habitude de s’en foutre complètement du côté argent et du côté gouvernemental, censures des medias, etc. On fait notre HipHop, on se moque complètement du reste, on le fait avancer, on le fait travailler.

 

Et comment vous voyez son développement d’ici deux ans? Est-ce qu’il y a déjà une projection jusque là?

Ce que j’aimerais, c’est que ça crée des vocations. Que d’autres gars fassent la même chose que moi, je ne suis pas contre. Partout on voit « la  première émission belge dédiée à la culture HipHop en Belgique », mais moi je serai super content que d’autres gars fassent d’autres émissions, pas sur le même concept ou les même idées. Mais il faut que d’autres s’y mettent, que les medias se développent en Belgique, en France, en Europe, partout dans le monde. Il faut que nos médias soient contrôlés par les gars du HipHop, et non pas par des gars du rock ou quoique ce soit! Mon but, c’est de mettre un coup de pied dans la fourmilière et que d’autres gars se disent « putain, il le fait tout seul ,mais pourquoi moi je ne pourrai pas le faire aussi! »

 

A quand une émission sur une chaîne de télé?

Il n’y a rien de prévu pour l’instant. Nous avons été approchés par deux, trois télés mais il n’y a rien de concret, rien d’écrit. Ça reste oral, juste des rencontres avec certaines personnes…

 

Pourquoi avoir choisi le titre de l’émission en anglais plutôt qu’en français ou en flamand?

Pour le coté universel, c’est ça le truc et aussi parce que le mot anglais Street Knowledge a une vraie place dans l’historique de la culture HipHop. C’est vraiment le côté connaissance de la rue, des médias… Tu te fais ton propre journal, tu es rappeur, tu fais ta propre opinion, tu donnes le message par toi-même, et il n’est pas censuré. C’est pour ça qu’on a voulu utiliser ce nom là en anglais.

 

Un mot de la fin?

Il faut qu’on développe absolument nous-mêmes nos médias et tout ce qui est autour des disciplines HipHop, que ce soit le management, la promo, etc. Il faut s’impliquer. Ici, en Belgique, ce sont tous les gars du rock qui ont arrêté leur groupe, qui ont pris un peu de bouteille, et qui, maintenant, se sont insérés partout, dans les communautés françaises ou au gouvernement, dans les postes de décisions… Si eux l’ont fait, pourquoi nous nous ne le ferions pas ?

 

http://www.street-knowledge.net

View Comments (0)

Leave a Reply

Your email address will not be published.

© 2023 La Voix du HipHop | Tous droits réservés.